Afin de faire face au réchauffement climatique et se conformer aux accords de Paris visant à limiter la hausse de la température mondiale à +1,5°C au-dessus des niveaux préindustriels, l’ensemble des pays doivent rapidement implémenter des stratégies de réduction de leurs émissions des gaz à effet de serre.
Pour ce faire, chaque pays réalise une feuille de route permettant d’amorcer la transition vers une économie bas-carbone. Pour la France, c’est la Stratégie Nationale Bas-Carbone (SNBC) qui définit la trajectoire de réduction des émissions de gaz à effet de serre jusqu’en 2050, afin d’atteindre à cette date la neutralité carbone.
Afin de s’aligner avec cette stratégie nationale et faire face au réchauffement climatique, depuis 2012 certaines entreprises et collectivités doivent réaliser un bilan des émissions de gaz à effet de serre (ou bilan GES), afin d’identifier les postes d’émissions les plus contributifs, avant de définir et mettre en place un plan d’atténuation de ces émissions.
Qu’est-ce qu’un bilan GES ?
Un bilan GES désigne, selon l’Agence de l’environnement et de la maîtrise de l’énergie (ADEME), l’évaluation de la quantité de gaz à effet de serre (GES) générée dans l’atmosphère par l’activité d’une entité (entreprise, collectivité, territoire, etc.) sur une année. Il a pour objectif de « réaliser un diagnostic des émissions de gaz à effet de serre des acteurs publics et privés, en vue d’identifier et de mobiliser les gisements de réduction de ces émissions », selon l’ADEME.
Les émissions de gaz à effet de serre de l’entité sont regroupées selon des « postes d’émission », c’est-à-dire des typologies d’émission tels que les déplacements domicile-travail, la consommation d’électricité ou encore les déchets.
Ces postes d’émissions sont répartis en 3 scopes :
– Le scope 1 concerne les émissions directement générées par l’organisation. Cela comprend par exemple la combustion d’énergie fossile ou les émissions directes de CO2 lors de la fabrication du produit.
– Le scope 2, concerne les émissions dites indirectes liées à la consommation d’énergie par l’entité pour son service ou produit. C’est-à dire les émissions générées par la production d’électricité, de vapeur, de chaleur ou de froid consommées par l’entité.
– Le scope 3, concerne les autres émissions, liées indirectement à la fabrication du produit ou du service. Il comprend, par exemple, les émissions liées à la production de véhicules, des bâtiments possédés ou gérés par l’organisation, le transport de matière ou encore les déchets générés.
Depuis le décret 2022-982 du 1er juillet 20221, les trois scopes doivent obligatoirement être pris en compte dans le Bilan des Emissions des Gaz à Effet de Serre réglementaire (BEGES) des entreprises, et ce depuis le 1er janvier 2023.
Quelles sont les structures qui doivent réaliser un bilan GES réglementaire ?
L’obligation de réaliser un bilan des émissions de gaz à effet de serre (bilan GES) a été instaurée en France par la loi Grenelle 2 en 2012. L’article L229-25 du code de l’environnement2 précise les entités soumises au bilan GES réglementaire (BEGES) :
– Les entreprises de plus de 500 employés (250 dans les DOM) ;
– Les établissements publics de plus de 250 agents ;
– Les collectivités de plus de 50 000 habitants (dont départements, régions…) ;
– Les services de l’Etat.
De plus, le décret n° 2021-1784 du 24 décembre 20213 prévoit l’établissement d’un bilan simplifié4 des émissions de gaz à effets de serre pour les entreprises de plus de cinquante salariés bénéficiant d’une aide de l’État dans le cadre du Plan de Relance. Les entreprises comportant plus de 250 salariés devaient soumettre leur bilan GES simplifié avant fin 2022, alors que celles comportant entre 50 et 250 doivent le soumettre avant fin 2023.
Le bilan GES réglementaire doit être renouvelé tous les 4 ans pour les entreprises, et tous les 3 ans pour les acteurs publics. En pratique, la majorité des acteurs le renouvelle tous les 1 ou 2 ans.
Par ailleurs, depuis 1016 ce bilan GES doit être publié sur la plate-forme informatique des BEGES5 administrée par l’ADEME. Les entreprises doivent également joindre un plan de transformation pour la réduction de leurs émissions de gaz à effet de serre dues à leur activité. Ce dernier doit présenter les objectifs, les moyens humains et financiers, ainsi que les actions envisagées sur le moyen et le long terme à cette fin et, le cas échéant, les actions mises en œuvre lors du précédent bilan.
En cas de non-respect de cette obligation légale, une amende de 10 000 € sera délivrée et 20 000€ en cas de récidive
Au-delà de la réglementation, pourquoi réaliser un bilan GES de son organisation ?
Majoritairement, la réalisation d’un bilan GES s’inscrit dans une dynamique de transition initiée par l’organisation souhaitant agir en faveur du climat et du développement durable. L’évaluation de ses émissions de gaz à effet de serre constitue souvent la première étape.
Mais ce bilan GES a également d’autres atouts pour votre organisation :
1. Optimiser vos dépenses
En passant au crible les différents postes de dépenses, il permet de détecter les dépenses inutiles, facultatives ou pouvant être réduites en adaptant la stratégie de l’organisation. Une stratégie de réduction des coûts sur la consommation d’énergie ou sur le poste déchets sont des exemples concrets de dépenses compressibles.
2. Améliorer l’image de son entreprise
En faisant preuve de transparence auprès des consommateurs et/ou clients, votre organisation démontrera son engagement et montrera ses efforts en matière de transition environnementale et lutte contre le réchauffement climatique. Elle sera ainsi mieux perçue auprès du public et de ses clients.
3. Garder vos talents
Des actions concrètes de la part de votre organisation engageront vos collaborateurs et renforceront leur motivation à travailler pour vous.
4. Un réel avantage concurrentiel
Grâce à votre démarche et vos efforts consentis en faveur du climat, votre entreprise sera appréciée de ses clients, partenaires et investisseurs. La performance extra financière de l’organisation devient dorénavant indispensable à mesure que les exigences RSE grandissent.
5. Evaluer la dépendance de l’organisation aux énergies fossiles
La réalisation du bilan GES permet également d’évaluer la dépendance de l’organisation à d’importantes sources de pollution, ainsi que sa vulnérabilité sur le plan de la performance environnementale et sur le plan énergétique.
6. Anticiper la réglementation
Avec le contexte climatique actuel et au regard de l’évolution de la réglementation sur le bilan GES (taille des structures concernées, scope à prendre en compte…), il est attendu un renforcement des exigences et des actions, de la part des entreprises, des acteurs publics ainsi que de la société civile.
Quelle méthode vous permet de réaliser un bilan GES ?
La méthode permettant de réaliser votre bilan GES est la méthode dite « Bilan Carbone® », élaborée par Jean-Marc Jancovici en 2004 pour l’Agence de l’Environnement et de la Maîtrise de l’Énergie (ADEME). Cette méthode est depuis 2011 la propriété de l’Association pour la transition Bas-Carbone, qui délivre des licences d’exploitation à des acteurs privés formés par l’Institut de Formation Carbone.
D’un point de vue calcul, pour réaliser la mesure des différentes émissions de gaz à effet de serre, le traitement des données s’appuie généralement sur un code de calcul fondé sur des facteurs d’émissions « physiques » ou « monétaires ». Ainsi le calcul opéré est le suivant :
Quantité GES = Quantité Consommée x Facteur Émission Physique ou monétaire
Les facteurs d’émissions utilisés sont ceux de la Base Carbone®, ou d’autres facteurs d’émission plus adaptés et documentés.
Comment réaliser un bilan d’émissions de gaz à effet de serre ?
– En faisant appel à un cabinet d’étude spécialisé
Certains cabinets sont experts dans l’élaboration du bilan carbone. Au-delà de l’élaboration du bilan GES, ils proposent souvent de vous accompagner dans l’élaboration et la mise en place d’une stratégie de transition carbone. Certains cabinets peuvent également vous accompagner sur d’autres thématiques, tels que votre stratégie RSE ou encore déchets.
– Utiliser une solution logicielle
Certains acteurs proposent une solution logicielle, connectée à une base de données de votre organisation (données issues de votre comptabilité par exemple).
– Former vos salariés
Une des solutions retenues peut être de former vos salariés à la méthode Bilan Carbone, proposée par l’Institut de Formation Carbone. Vous disposerez ainsi des ressources nécessaires afin de réaliser votre bilan carbone et de conduire vous-même votre stratégie d’atténuation des émissions de gaz à effet de serre.
Existe-t-il des aides pour diminuer le coût de son Bilan GES ?
Des subventions existent pour diminuer le coût de son Bilan carbone. Le dispositif Diag Decarbon’Action déployé par Bpifrance, l’ADEME et l’ABC – Association pour la transition Bas Carbone peut permettre de subventionner jusqu’à 60% de votre Bilan Carbone.
En pratique, quel est le bilan actuel du bilan GES obligatoire ?
D’après un article du monde à peine un tiers des quelque 5000 organisations privées ou publiques concernées par cette obligation légale l’ont respectée en 2021:
« L’échec du bilan carbone obligatoire, symbole du mépris des enjeux climatiques »6
1 : Décret n° 2022-982 du 1er juillet 2022 relatif aux bilans d’émissions de gaz à effet de serre – Légifrance (legifrance.gouv.fr)
4 Bilan GES simplifié : vous avez jusqu’au 31 décembre 2022
5 https://bilans-ges.ademe.fr/
6 L’échec du bilan carbone « obligatoire », symbole du mépris des enjeux climatiques (lemonde.fr)